Brigitte Dormont, titulaire de la Chaire Santé Dauphine et membre du Conseil économique et stratégique (CAE), Didier Tabuteau, responsable de la chaire Santé de Science Po, Claude Le Pen, professeur à l’université Paris-Dauphine et Frédéric Bizard, enseignant à Science Po, ont débattu le 4 juin, lors d’une table ronde, du plan d’économies sur les dépenses d’assurance maladie.
Dans le cadre du programme de stabilité pour 2014-2017, adopté le 29 avril par l’Assemblée nationale, le gouvernement veut réaliser 50 milliards d’euros d’économies sur les dépenses publiques, dont 10 milliards sur l’assurance maladie. Première question soulevée par les experts: que recouvrent exactement ces 10 milliards ? Sont-ils réalisés en plus de la limitation de la progression de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (Ondam, 2% en moyenne sur la période) ou sont-ils compris dedans ? Penchant pour la première solution, Didier Tabuteau estime que ce plan d’économies équivaudrait à trois années sans hausse des dépenses d’assurance maladie. Claude Le Pen fait une analyse contraire. Pour lui, ces économies sont intégrées dans la construction de l’Ondam, et seraient au total équivalentes à 3,3 milliards d’euros par an, contre 2,25 en 2014. Et de résumer : «Le gouvernement veut réaliser sur trois ans les économies qu’on aurait faites en quatre ans. Cela relève du plan com’».
Toujours est-il que, quelle que soit son ampleur, ce plan ne trouve pas vraiment grâce aux yeux des économistes. « Je crois qu’il est possible de rationaliser fortement le système sur trois ou quatre ans. C’est impossible ou extrêmement dangereux si c’est sous forme de rabotage », prévient Didier Tabuteau. Pour Claude Le Pen, « c’est un plan conservateur, qui fait trop ou trop peu. C’est trop car cela va appauvrir le système, c’est la stratégie du rabot. Mais ce n’est pas assez douloureux pour faire une réforme de structure et poser la place de l’hospitalisation ». Brigitte Dormont a regretté l’absence de précisions sur les mesures envisagées par l’exécutif pour « gagner en efficience », une démarche à ne pas confondre selon elle avec une politique de « rationnement ». Frédéric Bizard n’accorde « aucune crédibilité » à ce plan « de rigueur ». Et tous de pointer l’absence de cohérence avec la stratégie nationale de santé, dont les grandes lignes sont présentées le 17 juin.
Crédit photo : Serge Benaderette.